7 - Combat antiraciste : qui s’adresse à qui ?
Mercredi 30 novembre 2005
Tout est dans le titre. Le message est une chose, encore faut-il l’adresser aux bonnes personnes. De plus, la crédibilité et l’efficacité de la communication seront d’autant meilleures que le message sera généré depuis les bonnes personnes.
Qu’en est-il à ce jour ?
Les associations anti-racistes affichant une notoriété publique sont dirigées par des représentants de la communauté « victime » du racisme (noirs ou arabes en général). Leur audience, que l’on le veuille ou non, est aussi majoritairement une population de même origine.
Je pense que l’efficacité du combat en est extrêmement affectée. Que l’on ne se méprenne pas, loin de moi l’idée que des noirs ou des arabes ne sont pas capables de diriger un mouvement. Mais je pense qu’en tant que tels, ils ont un accès très difficile aux populations « cibles ».
Quelle cible pour cette communication ?
Le message doit s’adresser à la population blanche qui véhicule encore malheureusement un sentiment raciste, conscient ou inconscient. Je ne reviendrai pas sur les manifestations de ce racisme que j’ai décrites dans un précédent billet. Le discours destiné à convaincre est inutile lorsqu’il est adressé aux populations victimes du racisme. Ceux-ci sont déjà convaincus, et depuis leur tout jeune age. Ils n’ont pu, de par leur état, faire le leur du sentiment de condescendance raciste. Le discours est aussi inutile lorsqu’il s’adresse aux populations blanches déjà convaincues (heureusement il y en a !).
Ceci étant posé, comment capter l’attention et l’écoute de cette « majorité silencieuse » ? Il faut faire un peu d’empathie. Il faut comprendre que ces personnes, pour porter attention à un discours, ont besoin :
- Qu’il vienne d’un blanc (c’est cru mais c’est vrai)
- Qu’il ne les culpabilise pas
Alors, et seulement alors, ils seront peut être touchés par ce discours et par effet de rebond ils passeront du mode décrit plus haut a un mode d’écoute plus élargie.
De qui doit venir le discours ?
Je pense que tant que si peu de blancs s’engageront dans ce combat, la cause en souffrira. En effet, c’est le monde blanc qui doit maintenant bouger, changer et surtout faire preuve enfin de générosité. Je ne dis pas que les peuples victimes doivent se désengager, mais plutôt que le combat doit être bipolaire. Qu’il s’agit avant tout d’un exercice long et difficile de communication et qu’en tant que tel il faut choisir les bons acteurs.
En résumé :
Un noir qui se plaint du racisme en s’adressant à un blanc, consciemment ou non raciste, va très vite soit braquer son interlocuteur, soit le culpabiliser. Dans les deux cas, l’objectif de convaincre ne sera pas atteint. A contrario, un blanc s’adressant a ce même blanc va créer plus de curiosité, et surtout va amener l’audience à s’identifier a lui. A partir de cela, il sera beaucoup plus facile a la fois de déculpabiliser les gens et donc de faire passer le message.
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9 Comments:
Bonjour ,
je découvre votre blog en lisant votre commentaire sur le blog d'Isabelle .
Je pense complétement comme vous au sujet de ce que vous avez écrit aujourd'hui .
Ce que vous avez écrit , j'aurai pu l'écrire .
J'ai été enseignant pendant presque 40 ans et j'ai toujours insisté sur l'égalité entre les races , qu'il faut regarder les humains non pas en fonction de la couleur de leur peau , leur religion .
ce n'est pas la race , la nationnalité ou la religion qui font la valeur d'une personne .
Je pense profondément que les immigrés sont une chance pour la France . Il est facile de comprendre que chaque immigré amene chez nous des éléments de culture que la France ne possedait pas encore , chaque immigré est une opportunité d'ajouter une richesse à un groupe dans un domaine ou un autre .
.La France prétend être un pays d'accueil et répandre l'esprit de générosité de la Révolution de 1789 .
Raison de plus pour intégrer des étrangers qui sont dans le besoin .
Si je ne suis pas d'accord avec Isabelle , c'est qu'on ne répare pas Pierre en salissant Paul .
Ce n'est pas en présentant de façon négative l'intégration des Asiatiques que cela va arranger l'intégration des Africains .
Si les Africains ont du mal à s'intégrer ,il faut en chercher les causes sans avoir recours au bouc émissaire asiatique .
Je ne veux pas porter un jugement sur les Africains , ce serait idiot de ma part .
Mais les évenements de novembre en banlieue , qu'ils soient justifiés ou non , qu'ils soient l'expression d'une souffrance ou non , ne contribuent pas à l'intégration des Africains .
Les attentats intégristes dans le monde entier ,qu'ils soient justifiés ou non sont des maladresse énormes pour l'intégration des Africains en France .
Les enfants de banlieue qui dégradent les écoles , les gymnases ne font pas une bonne publicité .
Je ne juge pas ,je me suis souvent posé la question: si j'étais né dans leur famille , vécu dans leur milieu , subi les mêmes problèmes ,n'aurai je pas , moi aussi, fait comme eux ?
Je ne les condamne pas .
Je dis simplement qu'il faut qu'ils soignent leur image , qu'ils se fasse une publicité plus positive !
Je visiterai souvent votre blog .
Soyez assuré de mon soutien moral , de ma complicité .
Merci Jean!
Je viens de visiter votre site et je trouve vos photos epoustouflantes!
J'irai vous faire un petit message des que je me connecterai au boulot (je n'ai pas l'ADSL a la maison et votre page demande de la bande passante)
J'ai hésité avant de poster sur ce blog, vu l'engagement personnel et intime de l'auteur.
Le racialisme/racisme a une histoire dont le cours ne fut pas tranquille.
Les réactions, claires, prédictives contre le racisme furent celles aussi de Blancs. Il y eut une parole blanche contre le racisme.
Il y a une leçon à en tirer, sur leur portée, sur le processus d'identification qu'il a généré...
On peut dire qu'au départ seules les paroles des Blancs furent écoutées (non entendues; éliminées), la parole non blanche étant par essence considérée sans valeur.
La tentative de dialogue entre Blancs ayant déjà eu lieu, on peut observer ce qu'il s'est passé.
Aujourd'hui, on dit: le langage est trop unicolore et sent la lutte Blanc contre Noir, et non pas la lutte contre le racisme.
Autrefois, lorsque la discussion était monopolisée par les Blancs, il se passait pratiquement l'inverse: pour assurer sa légitimité, les interlocuteurs blancs devaient introduire une parole noire dans leur discours.
On leur disait: "vous parlez au nom des Nègres, mais de ces Nègres, qu'en savez-vous?" D'où une démonstration de Nègres instruits, éduqués pour appuyer les propos.
Ou bien il y avait une autre réaction: des Blancs qui parlaient contre le racisme, on disait qu'ils s'étaient identifiés aux Nègres, qu'ils n'étaient plus Blancs mais Nègres, qu'ils étaient devenus sauvages. Il y avait bien un processus d'identification mais non plus à soi comme Blanc mais à l'autre, le Noir.
Les Blancs qui parlaient pour les Noirs étaient devenus Noirs eux mêmes.
Cela devrait suffire à éclairer le propos sur qui doit parler du racisme.
D'autres réflexions sur le commentaire pré-antérieur.
Il y a aussi une histoire de l'immigration.
Dire que certaines communautés doivent soigner leur image cache plusieurs faits: un de ces faits est que justement ces communautés n'ont pas eu le contrôle de leur image.
On peut rappeler que les explosions de banlieues ne coincident pas avec l'arrivée de ces immigrants et qu'il a fallu un temps pour faire aboutir la fermentation.
On prend le train en marche sans prendre le temps d'analyse les stations précédentes. Or en l'absence de ces émeutes qui ternissent l'image, l'intégration de ces populations ne se passait pas franchement mieux.
On est bien dans une situation où quel que soit le mouvement adopté, on joue perdant.
Pas d'émeutes, intégration qui se passe mal.
Emeutes, intégration qui se passe mal ou moins bien.
On est dans le cas où on ne peut pas promettre une amélioration donc on menace d'une aggravation.
"Boucle la, ou ça ira encore plus mal pour toi."
C'est la situation actuelle. Les
comportements dociles ou indociles n'y sont pour rien. Des comportements dociles, il y en a eu avant, par exemple les Harkis qui n'ont pas bénéficié d'un différentiel d'intégration supérieur, bien malgré avoir choisi la France.
On tourne autour et on continue de tourner autour de la nécessité qu'ont eu les démocrates européens de renforcer leur société par le racisme.
Le racisme fut, est efficace pour aboutir.
Et si on ne discrimine pas autant les Asiatiques, c'est parce que l'on peut bien moins les discriminer, par le fait de manque de pouvoir.
Il n'est pas possible de discriminer un Chinois comme on discrimine un Africain.
Merci Jean-Pierre!
Je ne comprends pas pourquoi vous avez hesité avant de poster votre commentaire, tous les points de vue sont les bienvenus, lorsqu'ils restent respectables.
pour lutter contre le racisme
aller sur http://discriminations.over-blog.com/ur le site
A Anonymous
Ce blog n'existe pas
Bonjour,
Je découvre votre blog très intéressant. Je me permets une toute petite réflexion.
Je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous quand vous dites :
"Le discours destiné à convaincre est inutile lorsqu’il est adressé aux populations victimes du racisme. Ceux-ci sont déjà convaincus, et depuis leur tout jeune age. Ils n’ont pu, de par leur état, faire le leur du sentiment de condescendance raciste."
De nombreuses personnes, jeunes en particulier, lorsqu'elles sont victimes du racisme, réagissent par un effet boomerang en se montrant racistes à leur tour. Une sorte d'enfermement dans leur tour d'ivoire du genre : "ces racistes n'ont rien compris, nous sommes les meilleurs". Et ils deviennent racistes à leurt tour. On comprend pourquoi mais le fait est.
Parfois aussi, une éducation fortement identittaire rend les jeunes gens racistes car la peur de l'étranger existe partout dans le monde.
Et l'on entend des choses du genre : "quelqu'un qui est raciste c'est qu'il n'aime pas les Noirs ni les Arabes." Ce qui est quand même réducteur, même si ce sont eux, en France, qui sont les plus touchés par cette haine de l'autre.
A mon avis, il n'est pas toujours vrai que les victimes du racisme soient des gens convaincus et depuis leur tout jeune âge. Des explications sont nécessaires envers nous tous pour enfin accepter l'autre dans sa différence, quelles que soient son origine et ses particularités.
Allez-vous me prendre pour une nationaliste xénophobe si je vous dis que j'ai été victime de racisme dans les transports en commun parce que je suis blanche ?
C'est pourtant vrai. Et je ne me suis pas privée de le dire à ceux qui m'injuriaent.
Voilà, ce n'est qu'une anecdote mais elle me conforte dans l'idée qu'il est nécessaire d'éduquer tout le monde pour une vie harmonieuse entre tous.
Bonjour Bab, et bienvenue!
Vous mettez le doigt sur ce fameux racisme anti-blancs que j'ai déjà traité il y a quelques temps dans ce billet.
Je tiens toutefois à apporter un bémol à votre commentaire. Ce racisme est une forme de rejet, bien entendu, mais pas de rejet condescendant. C'est là toute la nuance, car il s'agit avant tout d'une réponse, inappropriée je suis d'accord, mais une réponse tout de même. En d'autres termes, je reste persuadé que cette forme de racisme serait moins présente si la condescendence occidentale n'était pas. Le lien avec La haine de l'occident traitée dans le dernier ouvrage de Jean Ziegler est d'une logique imparable.
Un autre effet boomerang, comme vous dites, s'est vu médiatisé dernièrement lorsqu'un public de jeune francais issus de l'immigration magrébine ont sifflé la Marseillaise. J'ai aussi donné mon point de vue sur cet évènement dans ce billet.
Le cercle infernal du rejet doit être ouvert par chacun de nous, et si, comme moi, vous êtes occidentale, l'ouverture n'est possible qu'en acceptant de regarder d'abord nos propres possibilités d'ouverture sans toujours attendre que d'autres fassent le premier pas.
Bonne journée!
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