21 - De la dignité et de l’indignation
Mercredi 11 janvier 2006
Dignité et bien-être sont-ils liés? Peut-on se réaliser sans rester digne? La dignité n’est-elle pas le jugement que l’on a de soi-même? Quelle influence a le regard des autres sur notre dignité? La dignité n’est-elle pas le meilleur garant de la citoyenneté et du civisme?
Telles sont les questions que je me pose lorsqu’il est question de racisme. La dignité est certainement ce qui permet à chacun de supporter le mépris. Attention, je ne confonds pas fierté et dignité. La fierté est à mon sens un sentiment qui compare l’individu aux autres, et est à ce titre un des moteurs du rejet et entre autres du racisme. La dignité est relative à l’opinion ou au jugement de soi. C’est pourquoi le jugement des autres, lorsqu’il atteint notre dignité, est si douloureux.
Cela peut arriver lorsqu’on a eu un comportement indigne. Dans ce cas, après l’avoir réalisé, on peut se corriger et ainsi retrouver sa dignité.
Cela arrive aussi malheureusement pour des raisons indépendantes de notre libre arbitre. Ne pas correspondre à certains critères existentiels peut en effet donner lieu à une remise en cause de notre dignité. Ainsi, on pourra parler de certains canons de beauté qui affectent des personnes trop grandes, trop grosses, pas assez bronzées, trop bronzées, trop frisées, etc… On en arrive à un sentiment de complexe qui est quelque part une perte de sa dignité, de son assurance.
Le sentiment d’appartenance à un groupe est facteur d’assurance et donc renforce notre opinion propre. Notre dignité, même objectivement non liée aux autres, est renforcée lorsque nous nous reconnaissons dans le groupe auquel nous appartenons. Les liens communs entre les individus du groupe nous permettent d’avoir un peu de nous-même chez les autres individus du groupe et donc de considérer le groupe comme un miroir d’une part de soi. Cette estime de soi est donc liée au sentiment d’appartenance.
Se sentir exclu pour des raisons diverses est un facteur d’affaiblissement de l’estime de soi. Un caractère solide pourra certainement compenser cette exclusion et conserver sa dignité. Néanmoins, chaque individu n’est pas obligatoirement doté d’un tel caractère. Le rôle du groupe est aussi d’accompagner les plus faibles. Ainsi, les repères communs au sein d’un groupe sont-ils facteur de frustration pour les minorités qui ne les partagent pas. Un exemple est l’histoire et l’image qu’elle donne des individus en fonction de leur appartenance ethnique. Présenter l’histoire de France comme la narration des seuls faits s’étant déroulés sur le territoire métropolitain ou mettant en scène uniquement des personnages issus d’un seul groupe ethnique, valorisant pour certains groupes et humiliant pour d’autres, a un effet d’exclusion sur ceux que l’on dit Français mais qui ne peuvent se reconnaître dans ce passé qui n’est pas le leur.
Les réactions peuvent être diverses:
Perdre sa dignité amène fatalement à s’autoriser des comportements amplificateurs de cette exclusion. En effet, dès lors que l’on s’accepte comme indigne, tout devient permis. Cette perte s’identifie à un renoncement. La dignité perdue, le civisme est affaibli et les dérives comportementales trouvent un terrain propice à leur développement..
A contrario, s’indigner est un réflexe de sauvegarde de sa dignité. L’indignation est finalement une affirmation de soi et une défense de la place à laquelle chacun a droit dans le groupe. L’indignation, pour atteindre l’objectif de renforcement de la cohésion du groupe, ne doit pas dépasser le seuil qui exclu d’autres individus à leur tour. Ainsi, affirmer haut et fort sa place dans l’histoire ne doit pas amener à culpabiliser ceux qui ont déjà la leur. De façon complémentaire, accepter de se regarder différemment pour rendre à l’autre sa dignité ne signifie pas de perdre la sienne. Cet équilibre fragile entre deux formes d’exclusion est celui qui permet à chacun de garder sa dignité…
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12 Comments:
Pour moi, le groupe, c'est l'humanité toute entière. Et mettre quelqu'un de côté, quel qu'il soit, c'est une façon de le mettre hors de la famille humanité. Le réflexe de "groupes" est à mon avis une construction de l'histoire, un conditionnement, et un enfermement. Car dès lors que l'on s'identifie à un groupe, il y a nous et les autres. On est loin de l'inclusion. C'est justement ce qu'a prôné N. Mandela, même si, en tant que politicien, demeure l'idée de nation, et donc de groupe.
Merci de votre éclairage.
Ne pas oublier que Nelson Mandela a créé la commission vérité et réconciliation qui a auditionné 22000 temoins pendant 52 semaines.
La commission avait trois objectifs :
- dire la vérité aux sud-africains à travers ceux qui ont vécu les persécutions ou leur famille
- donner aux victimes un droit de parole
- juger l’Etat mais aussi les conflits entre les mouvements anti-apartheid
Merci pour ton commentaire sur mon blog. Le tien est bigrement intéressant aussi, mais cela fait trop de lecture pour moi au quotidien. (satané boulot, quand tu accapares...). Pour ce qui est de l'échange de liens, est-ce à dire que tu souhaites que je mentionne ton blog dans ma liste de liens ? Parce que dans ce cas, ça va te coûter très cher ! Au moins un balottin de chocolats mensuel !! Non, je blague. Si telle était ta question, y a pas de soucis, je le fais de suite.
Merci Zebu!
C'est fait pour moi aussi!
Pour moi c'est fait Titophe!
Je suis comme Zebu pas trop le temps mais je vais essayer de passer régulièrement
Domi
Interessant ton blog mais comme Isabelle je n'ai aps el temps de m'y attarder... je rentre du boulot pour repartir d'aussitôt aller donner des cours du soir...
Je signe mon post précédent ;-)
Bonjour Emma
C'est tres simple, tu cliques sur le compteur de ce blog et cela t'amenera automatiquement sur un site pour creer ton propre compteur.
Amicalement,
Titophe
http://www.agoravox.fr/mot.php3?id_mot=227
Salut
Merci Stef!
Je suis en deplacement actuellement et je dois mettre de cote ce blog pour quelques jours. Mais je ne manquerai pas de visiter ce site qui me semble tres interessant.
A bientot!
Dimanche 22 janvier 2006
France Inter, le Théâtre du Rond-Point
et le Monde vous invitent à assister en direct à
BAOBAB
de 18h à 20h
Une émission de Stéphane Paoli
et Jean-Michel Ribes
Nos jolies colonies,
merci Maman, merci Papa
De l'article de loi sur les bienfaits de la colonisation à la question de l'esclavage, ce passé ne passe décidément pas. Et au fait, qui était maman, qui était papa?
Avec Gérard Courtois, Daniel Pennac,
José Pliya, Jean-Pierre Vincent,
Brigitte Smadja, Jean-Claude Tchikaya
Entrée libre
Réservation indispensable :
sur internet www.franceinter.com
par téléphone au 01 44 95 58 81
par SMS en envoyant baobab suivi de votre nom et numéro de téléphone au 62 030 (0.35euros/sms)
Pour relativiser tout ça, je rappellerai que les Francs n'étaient rien d'autre que des Barbares en leur temps... Et il suffit de considérer la lignée des rois de France pour constater que ce ne fut pas d'une limpidité exemplaire entre Clovis et Louis-Philippe... Je suis entièrement d'accord avec Isabelle. Soyons de notre temps et ayons la lucidité d'admettre que nous sommes de l'humanité toute entière, avec la même dignité pour tous (qui n'est pas un droit, mais un principe inaliénable et non-discutable).
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