Racisme et Histoire: Le Tabou

La société Francaise souffre d'amnésie. Elle se refuse à reconnaitre les périodes peu glorieuses de son histoire durant lesquelles l'esclavagisme et le colonialisme ont été justifiés par un racisme institutionnel. Ces périodes sont révolues, mais mal assumées, formant ainsi un bon terreau pour permettre au racisme institué à l'époque de survivre sous d'autres formes.

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Marié a une femme noire depuis bientot 20 ans, père d'enfants metis, je suis de plus en plus inquiet face aux non-dits de notre société occidentale. Admettre et reconnaitre notre histoire dans ses composantes les moins glorieuses serait enfin admettre qu'etre Francais, ce n'est plus seulement etre un descendant des gaulois. Nous pourrions rendre leur dignité a celles et ceux qui se sentent exclus.

Le coin des compteurs
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29 juin 2007

117 - «La vision de la nation est ethnicisée»

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Vendredi 29 juin 2007

Toujours en manque de temps, pourtant ce ne sont pas les sujets de rélexion qui manquent. Je relaye ici un article de "Libération" sans plus de commentaire:

«La vision de la nation est ethnicisée»
Maryse Tripier, sociologue, dénonce la posture de Sarkozy face à l'immigration.

Par Catherine Coroller
QUOTIDIEN : vendredi 29 juin 2007

Maryse Tripier est professeur émérite de sociologie à l’université Paris-Diderot, auteur avec Andrea Rea de Sociologie de l’immigration (éd. La Découverte, 2003). Elle a participé au forum organisé par le réseau Terra et plusieurs associations de chercheurs en sciences humaines (lire ci-dessous). Elle analyse la posture de Nicolas Sarkozy face aux questions d’immigration.



Pour vous, la création d’un ministère dont l’intitulé associe immigration et identité nationale n’intervient pas aujourd’hui par hasard.

Elle institutionnalise une forme de lepénisation des esprits à laquelle participent de nombreux médias depuis vingt ans sur fond de très forte dérive populiste. L’immigré, c’est l’«autre», forcément dangereux, menaçant. Elle instaure une logique unilatérale de tri entre les «bons» et les «mauvais» immigrés, voire les «bons» et les «mauvais» Français (enfants d’immigrés, par exemple). La vision de la nation est totalement figée et ethnicisée. Elle préexisterait, fixe et homogène, et ne serait pas agitée de conflits internes, de combats qui la construisent. Or nul Etat ne peut en donner la définition. D’ailleurs les immigrés ne s’intègrent pas à un objet abstrait mais dans les milieux ­populaires.

Ne faites-vous pas un procès d’intention à Nicolas Sarkozy?

Pour moi la ligne jaune a été franchie avec les expulsions d’enfants. Brice Hortefeux, lui aussi, annonce un chiffre d’expulsions en 2007 et 2008 et contredit par avance l’analyse «au cas par cas». Il rend institutionnelle une logique de suspicion. Pour limiter à tout prix les possibilités pour les étrangers de venir s’installer en France, on durcit encore le regroupement familial, on externalise les frontières, on réduit drastiquement le droit d’asile, qui a été injustement absorbé par le nouveau ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale.
A surveiller

Comment Sarkozy a-t-il réussi à s’allier une majorité de l’opinion publique ?

Il a réussi un casting «de rêve» pour son nouveau gouvernement. C’est sa vitrine, et pour les gens ça n’est pas simple de décrypter ses intentions.

N’est-ce pas votre rôle à vous, universitaires, spécialistes des questions d’immigration, que de rétablir une certaine vérité ?

Le principal obstacle pour nous, c’est l’anti-intellectualisme, la délégitimation des intellectuels qualifiés de «petite intelligentsia» . L’opinion publique dirait : «Vous ne savez pas, mais nous nous savons ce qui se passe près de chez nous.» Il faut que nous, chercheurs et enseignants-chercheurs, nous nous battions sur ce terrain, car nous produisons des connaissances, savons lire les chiffres. Nous menons des enquêtes, nous ne faisons pas que produire de la pensée simplifiée. Il nous faudra sans cesse rétablir les faits et les enseigner. Plus concrètement, dans la période, que nous réalisions des synthèses de nos travaux, des argumentations audibles. Le suffrage universel ne peut condamner au silence toute réflexion critique.



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27 juin 2007

116 - Métissage musical

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Mercredi 27 juin 2007

Trop peu de temps à moi ces derniers jours. Pour ne pas laisser cet espace abandonné, voici un bel exemple de métissage de genres musicaux réussi. Pour ceux qui connaissent et apprécient le Canon de Pachelbel, surprise garantie. Pour les autres, le talent de ce jeune guitariste est tout simplement époustouflant.






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20 juin 2007

115 - Le blog de Firmin

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Mercredi 20 juin 2007

Cela fait plusieurs mois que je visite régulièrement le blog de Firmin, espace atypique de la blogosphère. Nicolas, jeune homme de 25 ans, retranscrit la parole de Firmin, son grand-père de 85 ans. Ce dernier se transforme peu à peu en vieux sage du Net et semble prendre gout à transmettre ses pensées et ses expériences, à laisser une trace de nature nouvelle. Il n'hésite plus à remettre en question les certitudes accumulées au cours des années et à partager ses doutes ouvertement. J’ai décidé aujourd’hui de partager avec mes visiteurs ce blog et de recommander de régulières visites. Le dernier billet en date, Aimer son prochain ? a déclenché chez moi cette envie de partage. Bonne lecture à tous.



Titophe




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11 juin 2007

114 - Allan Bleck

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Lundi 11 juin 2007

J’ai reçu ce week-end un message fort gentil d’Allan Bleck, lecteur furtif de ce blog, et chanteur de son état. Curieux, j’ai voulu mieux connaître ce passant de la blogosphère qui a pris le temps de semer un petit caillou sur son chemin de troubadour. Une de ses chansons a sa place sur ce blog : « Si la mémoire te fait défaut ». J’espère que vous pourrez en profiter en utilisant le lien ci-dessous. Autrement, rendez-vous sur le site d’Allan, ses chansons sont en téléchargement gratuit.

♪Si la mémoire te fait défaut♪

Si la mémoire te fait défaut (Allan Bleck)

Si la mémoire te fait défaut,
Si tu n’ te souviens déjà plus,
Alors regarde dans mon dos
Tous les coups que j’ai reçus.
Souviens toi je suis le nègre.
Celui la même qu’on a vendu.
Celui la devenu si maigre.
Celui la même qu’on a pendu,
Sous les yeux de sa tribu.

Si la mémoire te fait défaut,
Si tu ne te souviens de rien.
Alors regarde dans mon dos
La trace de morsure des chiens.
Souviens donc toi je suis le juif.
Qu’on a déporté un matin.
Pour faire du feu pour faire du suif.
Celui la même mort de faim,
Sur le cadavre de qui l’on pisse.

Si ta mémoire te fait défaut,
Si tu n’te souviens plus du tout.
Alors regarde dans mon dos,
Je suis brûlé un peu partout.
Souviens toi je suis vietnamien.
J’habitais prés de Diên Biên Phu.
De mon village ne reste rien.
J’avais huit ans mais tu t’en fou,
T’avais massacré tous les miens.

Si ta mémoire te fait défaut,
Si tous tes souvenirs s’enfuient.
Alors regarde dans mon dos,
Je porte le destin des harkis.
Souviens toi je suis le bougnoule.
Qu’on a jeté dans un ghetto.
Le vieil arabe que l’on refoule.
Qu’on chasse du pied comme un cabot,
En le traitant de sale bicot.

Si ta mémoire te fait défaut,
Si tu prétends ne plus savoir.
Alors regarde dans ton dos,
Tu as semé le désespoir.
Regarde-moi, je suis d’ici,
Sans travail et sans logement.
Moi je suis né dans ce pays.
Mais tous mes frères ne sont pas blancs.
Non tous mes frères ne sont pas blancs.
Non tous mes frères ne sont pas blancs.





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06 juin 2007

113 - Lilian Thuram dit...

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Mercredi 6 juin 2007


Je n'ai pas de temps pour écrire en ce moment. Aussi, je reprends ci-dessous le texte de Lilian Thuram qui a servi d'introduction à la soirée du 7 mai 2007 réunissant des artistes et sportifs du monde noir et des médias pour lancer la série télévisée "Tropiques amers" diffusée le jeudi à partir du 10 mai sur France 3.

L'esclavage est un phénomène humain universel. La civilisation grecque en a fait un art de vivre et un fondement de sa société. L'Afrique précoloniale a pratiqué un esclavage traditionnel, fondateur de plusieurs empires. Sa pratique sur le continent européen était tellement développée que l'appellation "esclave" traduit une de ses sources géographiques, la Slavonie historique.

Mais l'esclavage transatlantique se distingue par trois singularités : sa durée, son organisation juridique et son fondement racial.

Sa durée, quatre siècles du 15ème au 19ème siècle, atteste de sa profondeur historique. Les Codes Noirs (français, anglais, espagnols) élaborés par les pouvoirs politiques de l'époque, légitiment et organisent son fonctionnement par des règles de droit méticuleuses et précises articulées autour de la définition centrale de l'esclave comme "bien meuble".

Son fondement idéologique et sa légitimation "morale" découlent de cette définition par la construction intellectuelle de la non-humanité biologique et génétique et de l'infériorité culturelle de ses victimes noires. Le racisme anti-noir a constitué la justification intellectuelle de la traite transatlantique, qui était avant tout une entreprise économique et commerciale visant à l'exploitation des "nouvelles terres" des Amériques et des Antilles. La même hiérarchie raciale avait légitimé l'extermination physique et l'ethnocide des peuples autochtones.

L'éradication démographique avait précisément servi de justification à l'organisation de l'esclavage, par le transfert massif et organisé d'une nouvelle "force de travail", provenant du continent africain, le plus rentable par sa proximité géographique. Les hommes, les femmes et les enfants noirs ont été enlevés, avec la complicité des pouvoirs féodaux esclavagistes.

L'esclavage a été structuré autour de deux facteurs lourds : le racisme et la violence.

Jean-Michel Deveau, éminent historien, l'a bien caractérisé dans les termes suivants : "L'esclavage transatlantique est la plus grande tragédie de l'histoire humaine par sa durée et son ampleur."

La violence a abouti à une saignée humaine dont les estimations exactes se montent à plusieurs dizaines de millions de personnes.

Le racisme a, par sa profondeur historique et culturelle, profondément structuré toutes les sociétés des Amériques et des Antilles, sur les plans politique, économique et social.

C'est cette tragédie qui a été déclarée "crime contre l'humanité" par la Conférence de Durban contre le racisme en 2001 et par le Parlement français grâce au combat historique de Madame Christiane Taubira. Ce crime est encore marqué par les deux entreprises d'occultation : le silence et l'invisibilité.

Le silence des livres d'histoire et l'invisibilité de ses victimes. Le travail de mémoire constitue donc une urgence pour réhabiliter la résistance, physique et culturelle de ses victimes, et surtout pour faire l'archéologie du racisme qui imprègne encore en profondeur les sociétés, et les cultures, qui en ont été les scènes principales.

Questionnons-nous...

L'Homme Blanc a-t-il encore un complexe de supériorité vis-à-vis de l'Homme Noir ?

L'Histoire a-t-elle inculqué savamment à l'Homme Noir la peur, le manque de confiance en soi, le complexe d'infériorité ?

N'est-il pas temps de déconstruire le racisme ?


par Lilian Thuram

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